Partout dans le monde, les associations d’aide aux personnes et aux enfants sont en première ligne pour faire face à la détresse née de la crise sanitaire. Le BICE a, dès les premiers mois, tenté de répondre à ces nouveaux besoins. Tout d’abord en réallouant les budgets de certains projets en cours à des actions d’urgence : distribution de paniers alimentaires, de masques et sensibilisation aux gestes barrière. Puis, en développant, en étroite collaboration avec ses partenaires de nouveaux projets « Initiative Covid ». C’est le cas en Arménie où la guerre dans le Haut-Karabach aggrave encore les conséquences économiques et psychologiques de la pandémie.
Beaucoup de peurs et de stress additionnés
Hasmik Petrosian, membre de l’association Arevamanuk, nous en dit plus sur cette action en Arménie. « Avec la fermeture des frontières en raison de la pandémie, les familles ont connu de graves difficultés financières, raconte Hasmik, surtout celles qui vivaient de l’argent gagné par les pères dans les pays voisins. Les enfants, qui n’allaient pas à l’école, se sont retrouvés confinés avec des parents stressés par le manque d’argent et la peur du virus. Des parents qui devenaient alors facilement irritables, voire violents. »
C’est dans ce contexte déjà tendu qu’a éclaté la guerre dans le Haut-Karabagh en septembre 2020. « Cette guerre a exacerbé toutes les difficultés. Les blessés ont afflué dans des hôpitaux déjà débordés par les malades de la Covid. Et le pays a perdu beaucoup de terres agricoles et de centrales électriques, ce qui a fait exploser les tarifs électriques et le prix des denrées alimentaires et, par conséquence, aggravé la crise économique. »
Répondre aux appels de détresse des enfants
L’association Arevamanuk gère un numéro vert pour les enfants en détresse. Le nombre d’appels s’est multiplié depuis lors. « On ressent beaucoup d’agressivité chez les enfants qui subissent le stress et la violence verbale, et parfois physique, de leurs parents, observe Hasmik. Abandonnés devant leurs jeux vidéos, certains enfants se sont lancés dans des défis de plus en plus dangereux, ayant même entraîné la mort de l’un d’entre eux. Nous recevons aussi des témoignages à propos d’enfants dont le père est mort à la guerre, et qui sont dans le déni, qui continuent à attendre un appel de sa part. En fonction de la situation, ce sont nos juristes, nos travailleurs sociaux ou nos psychologues qui prennent le relais. La durée du suivi proposé varie en fonction des besoins. »
Apprendre à protéger les enfants
Faire appel à un psychologue n’est pas dans les habitudes culturelles du pays. C’est pourquoi les kits d’urgence (nourriture, médicaments et produits d’hygiène) distribués aux 500 familles des enfants accompagnés par Arevamanuk comporteront également une plaquette explicative sur l’importance du soutien psychologique. Un soutien indispensable à ce que relate Hasmik. « Sur le principe des ateliers Résilience, nous avons demandé aux enfants de dessiner un parapluie en nommant ce qui, dans leur entourage, pouvait les protéger face à la crise. Les enfants qui avaient bénéficié d’un soutien psychologique étaient capables d’identifier des éléments protecteurs ; les autres n’en voyaient aucun. » Une école des parents a donc été intégrée dans le projet afin d’aider ces derniers à être moins angoissés et à interagir de manière positive avec leurs enfants.
En parallèle, 100 enseignants recevront une formation pour savoir mieux accueillir et gérer le désarroi ou les peurs des enfants. « En raison de la pandémie et surtout de la guerre, l’Arménie accueille beaucoup de migrants du haut-Karabach. Donner des clés aux enseignants pour qu’ils puissent répondre et orienter le mieux possible les élèves en souffrance psychologique nous semble donc important. » D’autant que notre partenaire craint une augmentation des violences domestiques en 2021, conséquence notamment du syndrome de stress post-traumatique lié à la guerre.