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Vers la mise en oeuvre de la résilience
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Développer les capacités de mieux répondre aux problèmes rencontrés

Le Covid-19, présent dans la majorité des pays, génère inquiétudes et angoisses chez beaucoup de personnes. Dans ce contexte, le BICE vous propose l’interview croisée de deux spécialistes de la résilience, la professeure Cristina Castelli de l’Université catholique de Milan et Stefan Vanistendael, ancien responsable R&D au BICE. L’occasion de mieux comprendre ce concept et de découvrir des activités à faire en famille ou seul… pour mieux vivre cette période de confinement.

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Qu’est-ce que la résilience ?

Cristina Castelli : La résilience est la capacité à se développer en présence de l’adversité. C’est un processus dynamique, la façon dont nous sommes capables de répondre aux petits ou grands problèmes rencontrés. La résilience permet à un individu de retrouver un équilibre psychologique. C’est une renaissance individuelle et sociale après des événements traumatiques.

Stefan Vanistendael : Cette capacité d’une personne ou d’un groupe (famille) à bien se développer en présence de grandes difficultés, ponctuelles ou chroniques, est visible dans certains cheminements de vie remarquables. Par exemple, celui de Nelson Mandela, d’Anne Frank ou encore celui décrit dans le film Les intouchables. Mais, la résilience n’est pas réservée à une élite de surdoués ou de privilégiés. La plupart du temps, elle se vit discrètement. Qui ne connaît pas un proche, famille ou ami, un voisin ou un collègue qui a eu une vie très difficile, mais qui a pu surmonter les problèmes, sans s’endurcir, sans haine, et en toute discrétion. Cette capacité n’est jamais absolue, toujours variable. Elle a plusieurs dimensions : la capacité à se protéger, à se (re)construire, à se projeter dans la vie.

Que peut-elle nous apporter dans un période comme celle que nous vivons actuellement ?

C.C. : Comme nous le disions, la résilience nécessite des capacités d’adaptation. Dans des moments difficiles, il est possible de découvrir en soi des ressources jusqu’alors inconnues ou inexplorées. Par exemple, la joie d’écouter ou de jouer de la musique, le plaisir de l’écriture, de la peinture… Ces ressources peuvent aussi venir de notre entourage, des amis, de la famille.

S.V. : Comme le souligne Cristina, la résilience, tout en ne sous-estimant pas les problèmes, nous ouvre le regard vers ce qui est positif, vers ce qui soutient la vie. Parfois soudainement, parfois petit à petit dans la durée. Souvent, cela se passe grâce à des rencontres, des échanges, des mots prononcés… D’un enseignant à un élève en difficulté par exemple.

La résilience peut aussi être liée à un objet, comme une photo spéciale, un projet ou un engagement, un événement, ou encore une expérience profondément empreinte de beauté – une mélodie, un coucher de soleil, un paysage, et certainement aussi une spiritualité non sectaire. Des ressources parfois connues, parfois à découvrir.

La résilience nous invite aussi à considérer nos fragilités et celles des autres. Et à construire avec. Parfois ces fragilités sont sources de vie : est-ce que l’amour est vraiment possible sans fragilité ? Ou est-ce que nous préférons admirer la perfection ?

La résilience, est-elle une compétence qui s’apprend ?

C.C. : Au niveau scientifique, il n’a pas été déterminé si la résilience est oui ou non innée. Autrement dit, si nous naissons avec des capacités de résilience et si ces capacités sont plus ou moins développées selon les personnes. Ce qui est sûr, toutefois, c’est que nous pouvons les cultiver, les renforcer. Les capacités de résilience de chacun peuvent ainsi se développer au cours de la vie. C’est pourquoi, au BICE, nous proposons des formations Tuteurs de résilience. Ces tuteurs aident les enfants qu’ils accompagnent à se sentir mieux, à croire en eux et à avoir de nouveau confiance en la vie.

S.V. : J’ajouterai simplement que la vie est notre professeure, souvent aussi pour la résilience.

Pouvez-vous partager avec nous quelques exercices, activités à faire pour mieux vivre la situation actuelle ?

C.C. : Il est important déjà de prendre soin de son entourage, de maintenir les contacts grâce aux nouvelles technologies. Nous pouvons aussi créer des réseaux avec ceux qui semblent être plus fragiles. Exercer la solidarité augmente en effet la sérénité, la paix. Et tout cela est contagieux, plus que le virus…
C’est aussi l’occasion de partager avec ses enfants. Il peut être intéressant, par exemple, de retrouver de vieilles photos et de les regarder en famille. Cela leur permettra de mieux connaître leur histoire. Cela leur donnera des repères.

S.V. : Voici plusieurs suggestions :
– Tout d’abord, soigner les relations humaines, comme le souligne Cristina. Cela peut aussi se faire en envoyant des messages de soutien au personnel médical ou aux personnes isolées dans les maisons de retraite. Notez aussi qu’une bonne écoute est fondamentale pour la qualité des relations humaines, pour la convivialité. Mais elle est très rare, très difficile. « Comment puis-je améliorer mon écoute ? », est un grand défi pour chacun.

– Respirer profondément pour réduire les tensions.

– Chercher des connections positives, petites ou grandes, avec la vie autour de nous. Ce sont souvent ces connexions positives qui nourrissent notre sentiment que la vie a un sens : jouer, regarder un film profond ou comique, écouter une belle musique, lire de la poésie, contempler une superbe image, se responsabiliser (aussi pour les enfants) en s’occupant de tâches à la maison, de plantes ou d’un animal, apprendre de nouvelles compétences, pratiquer un hobby, profiter du silence….

– Enfin, dans le contexte actuel, il est important de mettre en place des rituels. Un bon rituel est une petite « routine », habitée par la vie, qui nous soutient face à la fragilité de certaines situations. Ce conseil est valable à tout âge. Les rituels du soir par exemple sont importants. S’endormir est un abandon, un lâcher-prise, pour tous ; donc une entrée dans une fragilité totale. Un petit rituel (lecture, musique, comptine, doudou… selon les âges) peut faciliter l’apaisement par rapport à la journée passée et aider à s’abandonner au repos en confiance.

Des activités pour les petits ?

C.C. : Nous pouvons faire avec les enfants des activités de la vie quotidienne. Il ne s’agit pas de faire à leur place mais de les guider. C’est le moment de leur laisser faire de la cuisine, du nettoyage, de leur apprendre à faire leurs lacets… Les rendre actifs, plus autonomes augmentera leur estime d’eux-mêmes.

On peut aussi faire un petit jeu avec eux en leur demandant : « Dans quelle histoire aimerais-tu vivre ? »
Enfin, en reprenant l’outil de la Casita* de Stefan, nous pouvons leur demander de dessiner ou d’exprimer avec leurs mots ce qui les aide à se sentir bien depuis qu’ils doivent rester à la maison en raison du coronavirus. Chaque pièce de la maison peut ainsi être liée à un facteur de résilience (objet, personne, histoire…) qui lui permet de se sentir bien.

S.V. : Je ne peux que confirmer ce que Cristina dit. Et parmi les activités que j’ai citées précédemment, plusieurs sont valables aussi pour les plus petits, en adaptant les formes.

L’écriture par exemple aide à se représenter le changement, à l’intégrer… Mais comment se lancer ? Pouvez-vous partager avec nous des petits exercices qui nous permettraient d’écrire sur la situation, d’écrire sur ce que l’on ressent, d’écrire sur ce qui nous fait peur…

S.V. : Il est vrai que l’écriture peut aider. Et puis, si l’écriture n’est pas possible pour des raisons d’âge, de handicap ou autres, discuter, partager ce que l’on ressent ou des histoires avec une personne de confiance peut être d’un grand soutien.

C.C. : Pour les enfants, on peut, par exemple, leur proposer l’exercice suivant. On part d’une histoire déjà connue et on leur demande de changer la fin en leur disant : « Si nous étions au temps du coronavirus, qu’aurait-il pu arriver ? »

La Casita : La mise en oeuvre de la résilience

*Cet outil permet de manière simple de noter, dans les différentes pièces d’une maison préalablement représentées, des choses qui font que l’on se sent bien mais aussi, si l’on en ressent le besoin, des éléments qui font que ça ne va pas, des choses qui nous inquiètent. Pendant cette période de confinement, le BICE met à votre disposition son cahier Vers la mise en œuvre de la résilience : La Casita, un outil simple pour un défi complexe.

Des idées de lectures et de films…
Pour les adolescents et adultes :
Le Journal d’Anne Frank, un exemple de résilience par l’écriture
Un long chemin vers la liberté de Nelson Mandela
Le film Les Intouchables de Olivier Nakache et Éric Toledano

Pour les enfants :
Les histoires de Winnie L’Ourson, pendant lesquels l’Ourson agit en acceptant ses limites, ses fragilités.
De nombreux contes de Perrault, Grimm et Andersen, dont Le Petit Poucet, Peau d’Âne ou Cendrillon
Le dessin animé Walt Disney Le roi lion
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