« Il y a trois mois, alors que j’étais complétement désespérée, j’ai contacté votre chat pour une aide que je n’arrivais pas à recevoir dans la vie réelle. Tous les problèmes se sont accumulés d’un coup : j’avais peur de ne pas réussir mes examens, je me sentais oppressée par mes enseignants et mes camarades de classe, j’étais continuellement prise à partie par mes parents qui se querellent tout le temps. C’était tellement dur pour moi…. Un soir, j’ai écrit une longue lettre, incompréhensible à mes yeux, sur votre chat, sans espérer vraiment une réponse. Néanmoins, une psychologue merveilleuse m’a répondu avec compréhension et chaleur. Nous avons eu plusieurs conversations et j’ai suivi ses recommandations, même si c’était difficile. Cela m’a tout simplement permis de m’en sortir. Grâce à nos conversations, j’ai compris que j’avais de la valeur. Maintenant, j’ai 18 ans et je suis étudiante à l’université de médecine. J’ai décidé de devenir une pédiatre pour aider, comme vous, les enfants en détresse. Merci ! Je suis très reconnaissante pour le merveilleux travail que vous faites. »
Renforcement du soutien psychologique à distance pendant la crise
Cette jeune fille fait partie des 12 917 enfants d’Europe de l’Est qui ont bénéficié d’un soutien psychologique par téléphone ou par tchat en 2020 ; pour répondre, entre autres, à leurs préoccupations liées à la pandémie de Covid-19. Ce soutien est l’une des actions menées dans le cadre du programme de lutte contre la violence à l’encontre des enfants, en particulier de nature sexuelle*. Programme lancé par le BICE en 2019, pour une durée de trois ans. En Europe de l’Est, il se déploie dans cinq pays avec cinq partenaires locaux : Arevamanuk en Arménie ; Public Health Foundation of Georgia en Géorgie ; Children Support Centre en Lituanie ; Doctors to Children en Russie ; et Women’s Consortium of Ukraine en Ukraine.
Des actions complémentaires de prévention et d’accompagnement
Son objectif ? Lutter contre la violence à l’encontre des enfants, en particulier de nature sexuelle, dans le cercle de confiance (famille, école, etc.). Et ce, à travers des actions complémentaires de prévention et d’accompagnement thérapeutique et juridique des enfants victimes et de leurs familles. « Cette année 2 du programme a été marquée par la pandémie de Covid-19 et les mesures prises pour prévenir sa propagation, souligne Diana Filatova, chargée du programme de lutte contre la violence au BICE. Mais, malgré ces difficultés, nos partenaires ont su s’adapter. Les activités planifiées ont ainsi pu être réalisées en présentiel ou en distanciel. Nos partenaires ont également réussi à répondre aux nouveaux défis, comme l’augmentation des besoins en soutien psychologique et social. »
En matière de prévention, des ateliers autour d’une bande dessinée ont été organisés en Lituanie, auprès d’enfants âgés entre 7 et 17 ans. Et des cours en petits groupes dispensés à des adolescents victimes ou à risque de violence en Russie. Tout au long de cette 2e année de programme, plus de 1 600 parents ont également suivi une formation sur les problèmes de violence via une plateforme internet mise en place par le partenaire lituanien du BICE.
Former les professionnels pour une meilleure prise en charge
Sur le plan de l’accompagnement des enfants victimes et de leurs familles, deux volets ont été actionnés. 1er volet : la formation. Celle de professionnels de la protection de l’enfance en Arménie, Lituanie et Russie en vue d’améliorer la prise en charge des enfants. Mais aussi celle d’enquêteurs et de policiers dans le domaine de l’audition des enfants victimes en Russie et en Ukraine. « Une audition mal menée peut être vécue de manière très violente par l’enfant victime. En lui demandant, par exemple, de répéter son histoire plusieurs fois, on lui impose de revivre encore et encore ce qu’il a vécu. Un vrai traumatisme. Former les professionnels aux techniques de l’audition bienveillante est donc important », explique Diana Filatova.
Un accompagnement multidisciplinaire
2e volet : l’accompagnement des enfants victimes de différents types de violence. En 2020, 214 enfants ont reçu un accompagnement multidisciplinaire en Russie, Arménie et Ukraine. En Arménie, des consultations psychologiques auprès de 155 enfants affectés par la guerre dans le Haut-Karabach ont également été mises en place. Enfin, le soutien téléphonique (Géorgie) ou par tchat (Russie) a été renforcé pour répondre aux besoins liés à la crise sanitaire et sociale.
En Géorgie, le partenaire du BICE a continué son accompagnement des enfants à comportements sexualisés inappropriés potentiellement dangereux pour eux et/ou pour leur entourage. Après la publication en 2019 d’un guide méthodologique sur l’accompagnement de ce public, des formations ont été menées auprès de professionnels. Et 35 enfants ont bénéficié d’un suivi par notre partenaire.
Une dizaine d’actions de plaidoyer
Parallèlement, le BICE et ses partenaires ont poursuivi leurs plaidoyers au niveau national et international. En 2020, une dizaine d’actions ont été menées. Trois exemples :
-En Arménie, le partenaire local a contribué au plaidoyer national appelant à la ratification de la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels (Convention de Lanzarote). La Convention a été ratifiée par le parlement le 11 mai 2020.
-En Lituanie, le partenaire local coordonne les activités de la coalition de 15 ONG « For Children’s Rights » active dans la promotion et la défense des droits de l’enfant. En 2020, la Coalition a notamment œuvré à l’établissement d’une ligne téléphonique d’aide psychologique dédiée aux enfants fragilisés sur le plan émotionnel par la pandémie.
-Sur le plan international, le BICE et son partenaire russe ont saisi l’opportunité offerte par la candidature de la Russie au Conseil des droits de l’homme (2021-2023) pour émettre quelques recommandations dont l’interdiction des châtiments corporels ou le renforcement de la protection de l’enfant contre tout type de violence à l’école.
Enfin, le BICE a organisé en novembre une conférence régionale, en coopération avec le ministère français des Solidarités et de la Santé, l’OMS Europe, le Global Partnership to End Violence Against Children (End Violence) et l’UNICEF. Elle a réuni 180 personnes représentants 9 pays européens engagés dans la lutte contre la violence envers les enfants.
*Ce programme se déploie dans cinq pays d’Europe de l’Est mais aussi dans quatre pays d’Amérique latine.
Quelques chiffres… en 2020 :
-2 859 professionnels de la protection de l’enfance ont été formés aux différents aspects d’accompagnement des enfants victimes de différents types de violence.
-45 membres des équipes multidisciplinaires ont été formés aux bonnes pratiques d’audition.
-214 enfants victimes de différents types de violence ont reçu un accompagnement multidisciplinaire.
-12 917 enfants ont bénéficié de consultations psychologiques par téléphone ou par chat.
-155 enfants vivant dans des familles déplacées en raison du conflit au Haut-Karabach ont bénéficié de consultations psychologiques de crise.
-Plus de 140 parents des enfants accompagnés ont également été pris en charge.
-35 enfants ayant des comportements sexualisés inappropriés ont bénéficié d’un soutien thérapeutique.
-329 enfants ont amélioré leurs capacités de prévenir et signaler les violences, en particulier de nature sexuelle.
-1 629 parents ont participé aux formations leur permettant d’améliorer leurs connaissances sur les violences sexuelles à l’encontre des enfants.
-124 151 personnes ont bénéficié de campagnes de sensibilisation à travers les réseaux sociaux consacrées à la parentalité positive et aux mesures de protection pendant la Covid-19.