A partir du 1er juin deux Centres du BICE ré-ouvrent leurs portes après la crise postélectorale en Côte d’Ivoire.
Désiré Koukoui, directeur des actions et projets du BICE sur place, nous évoque la situation actuelle au pays.
1. Comment le pays se relève-t-il après des mois d’incertitudes et d’insécurité ?
La Côte d’Ivoire a frôlé la catastrophe avec cette crise postélectorale. Des pertes en vies humaines et des destructions de biens. Quel gâchis! Dieu merci, la sagesse a fini par visiter les protagonistes de la crise et la situation se normalise progressivement et plus vite qu’on ne pense. Les quelques miliciens et mercenaires irréductibles qui se sont retranchés dans la commune de Yopougon et qui ont semé la désolation ont fini par être débusqués. Certains se sont évanouis dans la nature et constituent encore des menaces pour la sécurité mais les nouvelles autorités veillent au grain. Je crois que la crise est maintenant derrière nous. Le conseil constitutionnel a reconnu la victoire du nouveau Président, ce qui a consacré le retour à la normalité. Il restera à panser les plaies de la cohésion sociale qui a été rudement éprouvée et relever les défis de la reconstruction du pays.
2. Quelles sont les conséquences engendrées par la crise électorale en ce qui concerne les centres du BICE ?
Le BICE a été durement touché par cette crise. Fermeture de centres privant les enfants des actions de protection sociale, destructions des infrastructures de protection des enfants à la brigade de protection des Mineurs et dans les Maisons d’Arrêt et de Correction, en particulier à la MACA (infirmerie et Atelier d’ergothérapie), points d’écoute dans les quartiers etc… Le déplacement des populations a occasionné la dislocation des Comités Locaux de protection des enfants (CLPE) ce qui prive le BICE d’un outil communautaire précieux de protection des enfants qui a été constitué au prix de mille efforts. Il va falloir reconstruire tout ceci dans un contexte où les ressources se raréfient. Mais l’espoir est permis vu la disponibilité des nouvelles autorités qui ont pris des engagements fermes en matière de droits de l’homme.
Le Centre Sauvetage du Plateau est resté ouvert pendant toute la période de la crise pour offrir une assistante aux enfants sans liens parentaux, victimes de violences et d‘exploitation. Ce sont une quarantaine d’enfants, filles et garçons victimes qui ont pu bénéficier de l’assistance du centre même au plus fort de la crise. Avec la normalisation progressive de la situation, nous comptons ré ouvrir les autres centres dès le 1er Juin.
3. Peut-on dire que le moment d’urgence est passé ?
Nous sommes encore dans une période d’urgence car beaucoup de familles déjà en situation de précarité ont tout perdu et on dû se réfugier dans des sites de personnels déplacées ou dans leurs villages. La fermeture des banques durant quatre mois a perturbé le système financier et commercial et les pillages des entreprises ont déstabilisé la vie dans Abidjan. Ce sont les enfants qui sont les grandes victimes. Certaines écoles ont aussi été pillées, sans compter le nombres de familles endeuillées (plus de trois milles tués ou disparus enregistrés à ce jour). Il faut dont continuer d’apporter un soutien aux enfants victimes et parallèlement travailler à la réconciliation en apportant aux enfants victimes l’assistance psychoaffective pour surmonter les affres des bombardements que la ville d’Abidjan a connus. Il y a eu aussi quelques adolescents associés aux forces combattantes qu’il faut aussi prendre en charge. Tout cela accompagné d’une action de plaidoyer pour accompagner les nouvelles autorités du pays afin de préserver les acquis de la protection des enfants.
4. Quels sont les défis qui se présentent au BICE dans cette période post crise ?
Le premier défi est celui de la réconciliation, du désarmement des cœurs. La haine a été semée dans les cœurs ces dernières années opposant les ivoiriens les uns aux autres. Les enfants n’ont pas échappé à ce phénomène. Il va falloir donc travailler à la cohésion sociale en investissant sur les enfants. Le second est celui de l’accompagnement des initiatives communautaires en vue du renforcement de la société civile pour une meilleure protection des enfants. Le troisième est celui du l’accompagnement des nouvelles autorités pour un environnement protecteur des enfants. Sans oublier la poursuite du renforcement des capacités des acteurs.
Le BICE a besoin du renforcement de l’appui des donateurs pour poursuivre ses actions de protection et d’assistance aux enfants les plus vulnérables. Il nous faut réhabiliter les infrastructures de protection des enfants afin d’aider l’Etat qui sera occupé par d’autres urgences. Pour ce faire, il nous faut reconstituer nos équipes et surtout les outiller pour affronter les nouveaux défis d’un pays qui sort d’une longue crise politico-militaire.
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