Peu de pays ont souffert comme le Cambodge sous le régime des Khmers rouges. Davy Tith a vécu cette période effroyable. Elle y a perdu une grande partie de sa famille et a vu les cadavres flotter dans la rivière de Sangker. Petite-fille d’un maître bouddhiste, fille d’instituteur et institutrice elle-même, elle aurait pu être exécutée comme le furent la quasi-totalité des intellectuels du pays. Elle fait alors un serment : « Si je survis au régime de Pol Pot, je consacrerai le reste de ma vie à l’humanitaire. ». Promesse tenue : elle se dévoue depuis plus de 20 ans à l’éducation des enfants du Cambodge.
« La paix vient de la communauté humaine. »
C’est à la vue de l’état déplorable de l’hôpital de Battanbang, où elle conduit son fils malade en 1995 que sa vocation se confirme. « Je voyais les enfants pleurer, parce qu’ils n’avaient pas de médicaments, rien à manger. Beaucoup d’entre eux avaient été mutilés par les mines restées enfouies dans le sol. Et quand je leur demandais ce qu’ils feraient une fois chez eux, ils me répondaient : mendier. » Davy Tith décide alors de quitter son métier d’interprète pour créer Opération Enfants de Battambang (OEB). Son objectif : aider et éduquer ces enfants.
L’association prend en charge l’éducation des enfants mutilés. Pour les plus handicapés, elle embauche des professeurs et des gens du village qui savent lire et écrire pour assurer l’école à domicile, à eux et à leurs petits voisins. C’est alors que Davy Tith découvre un nouveau problème : la discrimination dont sont victimes ces enfants. « Dans la religion bouddhiste », explique-t-elle, « on pense que les handicapés sont des personnes qui ont mal agi dans une autre vie. » Nous sommes en 1996. Davy Tith comprend qu’il lui faut non seulement éduquer les enfants, mais aussi sensibiliser les communautés aux droits de l’enfant.
22 ans au service des enfants au Cambodge
L’organisation croit vite. Elle s’enrichit de travailleurs sociaux qui habitent les villages et peuvent ainsi agir directement au sein des communautés. De nombreuses organisations internationales lui apportent bientôt leur soutien : l’Unicef, Save the children, le BICE, Oak Foundation, Shmitz Stiftungen,… Elle étend son action dans 9 provinces du Cambodge et choisit de ce fait de changer de nom pour devenir Opérations Enfants du Cambodge (OEC).
Cela fait aujourd’hui 22 ans que la frêle Davy Tith fait reculer l’ignorance et la maltraitance dans les zones les plus marginalisées de son pays. Elle le fait par amour des enfants et par fidélité à la promesse qu’elle s’est faite d’aider les autres si elle survivait. Mais, aussi en mémoire de son grand-père, qui lui a appris la sagesse bouddhiste, et de son père instituteur. « Il me disait ‘sans connaissances, un homme n’est pas un homme, une femme n’est pas une femme. ». Parmi ses collaborateurs aujourd’hui, une quinzaine lui sont fidèles depuis plus de quinze ans. Tous ensemble, ils œuvrent à reconstruire petit à petit le pays, convaincus tout comme Davy Tith que : « la paix vient de la communauté humaine, pas de la politique, pas de la force, pas des fusils. »
Retrouvez le très beau portait de Davy Tith réalisé par Euronews