Changer son regard, prendre de la hauteur et le temps de comprendre… C’est par ces mots que la formatrice et psychologue Alda Segla, consultante pour le Bice, a débuté la formation Résilience organisée en Côte d’Ivoire pour une vingtaine de participants, spécialisés dans l’accompagnement des ECL. « Nous sommes tous susceptibles d’être orientés par des stéréotypes, des idées préconçues sur les enfants en conflit avec la loi. Et ce, malgré nous, explique Marie-Laure Joliveau, chargée de ce programme au sein du BICE. Travailler avec l’approche résilience nécessite de changer cela, de prendre le temps de réfléchir à notre approche, de regarder au-delà de l’infraction commise. Ce n’est pas évident mais essentiel pour sortir d’une routine de travail, pour proposer un accompagnement plus adapté aux enfants. »
Identifier pour chacun les facteurs de risque et de protection
Le groupe a ainsi commencé par définir les concepts de délinquance et d’ECL. Cette première étape a permis de mettre en avant que les causes affectives, psychoculturelles, sociales du passage à l’acte délinquant ne sont pas les mêmes selon les enfants, selon leur vécu. « Il est donc primordial de prendre le temps de les identifier pour chacun d’entre eux. Cela permettra ensuite de leur offrir une réponse adaptée à leurs besoins. À ce sujet, l’histoire du singe qui veut sortir le poisson de l’eau pour le sauver est très parlante. On ne peut pas en effet agir sans connaitre les besoins de l’enfant. Et il ne faut certainement pas les imaginer. »
Outre les facteurs de risque, il est également important d’identifier les facteurs de protection présents en chaque enfant et dans son entourage. Cela l’aidera à se reconstruire, à s’orienter vers un développement positif. « En prenant conscience de ses capacités, l’enfant en conflit avec la loi sera aussi amené à s’assumer, à se projeter dans l’avenir. Ce cheminement est indispensable pour qu’il comprenne bien les conséquences de ses actes, qu’il se responsabilise et prépare la restauration du lien social abimé par l’infraction commise. »
Réalisation d’ateliers “Résilience” auprès d’enfants et d’adolescents du Carrefour Jeunesse
Pour cela, la formatrice a présenté aux participants plusieurs ateliers à mettre en place avec les enfants. Des ateliers qu’ils ont d’abord testés entre eux avant de les réaliser auprès d’une soixantaine d’adolescents du Carrefour Jeunesse de la communauté Abel à Grand Bassam près d’Abidjan. Une expérience très appréciée. Pour certains enfants, cet espace de parole, d’expression de leurs vœux et de leurs émotions a été vécu avec beaucoup d’intensité. « Il y a eu de nombreux sourires et des larmes aussi. Pour l’une des enfants, c’était la première fois qu’elle parlait de ce qui la préoccupait. »
Parmi les ateliers proposés dans le care de cette formation Résilience : 5 doigts 5 qualités qui permet à l’enfant de découvrir ses qualités à travers le regard des autres ; la malle des désirs pendant lequel l’enfant formule ses souhaits, ses envies ; Yeux bandés pieds liés au cours duquel deux enfants doivent collaborer avec les conseils de leurs camarades pour avancer ; ou encore la ligne du temps, une activité pendant laquelle l’enfant raconte son histoire. « Tous ces ateliers sont des outils d’accompagnement, non une finalité. C’est un moyen ludique de découvrir l’enfant et ses ressources pour ensuite planifier les actions nécessaires à sa reconstruction. C’est aussi bien sûr l’occasion pour l’enfant d’exprimer ce qu’il ressent, de mieux se connaître. »
Cette première formation Résilience marque ainsi le début d’une évolution des pratiques pour les participants. Plusieurs rendez-vous pour les accompagner dans la mise en application des apprentissages sur le terrain sont d’ores et déjà programmés. Le prochain devrait se dérouler fin août à Lomé au Togo.
*Don Bosco (Bénin), l’A2PEJF-Togo et les partenaires du BICE pour le programme Enfance sans barreaux, DDE-CI (Côte d’ivoire), BNCE-RDC, BNCE-Togo, BNCE-Mali.