Pour répondre à ces questions, entretien avec Zoel Antonio Franco Chen, coordinateur du programme Enfance sans barreaux au Guatemala et coordinateur de l’ICCPG (Institut d’études comparées en sciences pénales du Guatemala). Cette institution collabore avec le BICE depuis 2008 et accompagne les enfants en conflit avec la loi dans 4 régions du pays.
1) A quoi sert le plaidoyer national pour défendre les droits des adolescents en conflit avec la loi ?
Même si les droits des enfants sont reconnus par la Convention relative aux droits de l’enfant, les Etats n’ont jamais fini de travailler sur la question. La mobilisation des ONG pour défendre la cause des enfants est donc primordiale. Le plaidoyer doit servir à la formulation de politiques publiques. Il passe également par l’identification et la valorisation de pratiques respectueuses des enfants en conflit avec la loi.
2) Quel exemple concret de plaidoyer pour une meilleure justice juvénile pouvez-vous nous donner ?
Dans le cadre du programme Enfance sans barreaux, une stratégie de plaidoyer a été élaborée et mise en œuvre. En premier lieu, nous nous basons sur des données scientifiques et des travaux de recherches afin d’analyser le système de justice juvénile du pays concerné, avec ses points forts et ses faiblesses. Nous formulons ensuite des propositions et nous nous engageons pour leur mise œuvre afin de favoriser un système de justice juvénile réparatrice. Ce processus nous a conduits à figurer aujourd’hui parmi les principaux experts en matière de justice juvénile au Guatemala. Nous avons été sollicités par le gouvernement et les institutions publiques, qui nous ont confié des missions de conseil et de formation auprès de futurs juges pour enfants. C’est une avancée considérable dans la mesure où la spécialisation des juges est fondamentale. Elle permet de changer le regard et les pratiques des fonctionnaires pour que la justice juvénile devienne réparatrice.
3) Quels obstacles avez-vous rencontré au Guatemala pour mener ces actions de plaidoyer ?
Certains fonctionnaires de justice et une partie de la classe politique réclament un système plus répressif. Ils tentent de convaincre l’opinion publique que l’abaissement de l’âge de la responsabilité pénale et la tolérance zéro peuvent être une solution. Actuellement, nous sommes pratiquement la seule organisation de la société civile au Guatemala à combattre ce mouvement, relayé par les medias.
4) Quels sont vos objectifs pour ces prochains mois ?
Dans beaucoup de pays, le contrôle de l’exécution des mesures socio-éducatives est aléatoire ou inexistant. De bonnes expériences en Equateur et en Colombie avec les Tertiaires Capucins semblent aller dans le bon sens. Mais au Guatemala, il existe un réel manque d’accompagnement pédagogique des adolescents qui accomplissent une mesure socio-éducative. L’idée est donc de mener des actions afin de construire un modèle ou processus favorisant un accompagnement de qualité des enfants en conflit avec la loi.
Par ailleurs, nous allons poursuivre nos efforts pour informer les adolescents sur leurs droits. Certains d’entre eux, condamnés par la justice, ne connaissent pas leurs droits au cours de la procédure judiciaire. Nous devons faire ce travail d’information et de sensibilisation. Même s’il a commis un impair, un enfant a des droits inaliénables que nous devons tous respecter.