« Ce projet nous permet d’aider 250 enfants et adolescents déplacés, obligés de vivre dans l’un des trois camps de fortune (Kayembe, Kanaruchinya ou Mugarura) qui s’étendent en périphérie de Goma. Ces enfants ont dû fuir avec leurs familles les violences perpétrées par les rebelles du M23, et le conflit entre ce groupe armé, les groupes d’auto-défense (Mai Mai, Nyatura, Wazalendo, Pareco, etc.) et l’État », explique Men and Women Working Together (dénommé auparavant Gewevuca), partenaire du BICE.
Les parents qui vivaient de l’agriculture, de l’élevage et du petit commerce à Rutshuru, Nyiragongo ou encore Masisi ont tout perdu. Désormais entassés dans les camps, qui ne cessent d’accueillir de nouveaux déplacés, ils ne peuvent répondre aux besoins de leurs enfants ni payer les frais liés à l’école. « La misère est immense et beaucoup d’enfants errent dans les rues. »
Actualités sur la situation – 08 février 2024
La guerre est aux portes de Goma depuis quelques jours. D’après les informations transmises par nos partenaires sur place, les habitants des villages situés à l’ouest de Goma fuient, effrayés par les bombes qui tombent autour d’eux. « La situation des enfants est déplorable. Les rebelles ne font que conquérir du terrain. Les habitants sont affolés », nous précisent-ils.
À Goma où commence ainsi à affluer une nouvelle vague de déplacés forcés, la situation est tendue car les habitants sont inquiets de la proximité du conflit. Des engins explosifs sont en effet tombés à la périphérie de la ville.
Aux côtés de ces familles depuis plusieurs mois, Men and Women Working Together et le BICE ont aidé 200 enfants et adolescents à retourner en classe en septembre dernier. Depuis janvier 2024, grâce à de nouvelles actions, 75 de ces jeunes, particulièrement fragiles, reçoivent un soutien supplémentaire. Les 175 autres bénéficiaires du nouveau projet ont, eux, été repérés par leurs enseignants pendant le premier trimestre.
« Prévenus par les écoles que certains enfants étaient en souffrance sur le plan psychologique ou n’arrivaient pas à bien suivre les cours, notamment à cause de la faim, nous avons décidé avec le BICE d’agir sur ces deux plans. Nous concentrons nos actions sur deux établissements, l’école de Muningi (5-12 ans) et l’institut Muningi (13-17 ans), afin d’optimiser notre suivi. Ce groupe scolaire, qui existait avant l’arrivée des déplacés, a vu le camp de Kayembe se développer autour de lui. Il en est désormais en plein cœur et peu d’aides lui sont fournies », précise notre partenaire.
Agir sur plusieurs leviers pour un accompagnement efficace
Soutien alimentaire
Deux fois par semaine, jusqu’à la fin de l’année scolaire, deux agents dont l’un est formé en nutrition, préparent et distribuent le matin avant l’école une collation composée de bouillie vitaminée au lait et de pain avec du beurre d’arachides.
Parallèlement à cette action, notre partenaire plaide auprès des autorités locales de la DIVAS (Division des affaires sociales) et de l’EPST (Enseignement primaire secondaire et technique) ainsi que de l’Unicef et du PAM (Programme alimentaire mondiale) afin d’évoquer la nécessité de développer les aides alimentaires et matérielles (fournitures scolaires et uniformes) pour les familles déplacées les plus vulnérables. La mise en place de cantines scolaires est aussi un sujet à aborder. En luttant contre la malnutrition et en favorisant ainsi les apprentissages, les repas servis à l’école participent à l’effectivité des droits à la santé et à l’éducation.
Le BICE et Men and Women Working Together souhaitent également attirer l’attention de la DIVAS et de l’EPST sur la nécessité de doter les écoles accueillant beaucoup d’enfants déplacés d’un travailleur social ou d’un psychologue. Car les besoins de soutien et d’écoute y sont immenses.
Accompagnement psychosocial
Entre-temps, pour pallier cette carence, chacun des 250 enfants participe dès le début du projet, à un entretien individuel pour évaluer ses difficultés. Les plus meurtris sur le plan psychologique (une soixantaine) bénéficient d’un suivi renforcé en résilience. Au cours de 6 à 10 ateliers, chaque groupe de huit enfants travaille sur l’expression des émotions, la consolidation des ressources internes et externes, la confiance en soi. Les séances sont suivies d’entretiens personnalisés afin d’approfondir avec chacun les sujets abordés. De plus, en cas de nécessité, un enfant peut être orienté vers le centre de santé Heal Africa.
Les travailleurs sociaux de Men and Women Working Together prévoient, de surcroît, de rendre visite aux enfants accompagnés à domicile. Et de faire régulièrement des points avec leurs écoles. « La collaboration avec les familles est tout aussi indispensable. Car si adéquatement soutenues elles – peuvent jouer un rôle clé dans le développement de la santé mentale de leurs enfants. Nous échangeons donc avec elles sur la parentalité positive, l’importance de l’éducation des filles comme des garçons, la résilience… », explique notre partenaire.
Renforcement de la résilience communautaire
En vue de favoriser l’intégration des enfants déplacés à l’école, Men and Women Working Together intervient régulièrement dans les salles de classe. Il échange avec les élèves sur la non-discrimination, l’entraide, le respect de l’autre… 15 enseignants sont aussi sensibilisés pour porter ces messages. L’objectif étant de favoriser un climat apaisé et sécurisant au sein des deux écoles. Et de faire de ces lieux des facteurs de résilience.
Un ensemble d’actions qui favorisent à la fois la santé physique et mentale des enfants et des adolescents et leur maintien à l’école. Tout en aidant les enfants à se reconstruire et à envisager leur avenir, elles les éloignent des dangers de la rue et des risques de recrutement par les groupes armés.