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Enfants violences
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Sofia : « Je ne souhaite à aucun enfant ce que j’ai vécu »

Selon un rapport de plusieurs agences de l’ONU de 2020, un milliard d’enfants sont victimes de violences chaque année dans le monde. Des violences qui entraînent traumatismes, handicaps et parfois même la mort. Sofia, aujourd’hui âgée de 15 ans, est l’une de ces victimes. Accompagnée dans une approche de résilience depuis quelques mois par notre partenaire OPA Niños libres, dans le cadre du programme Enfance sans barreaux qui promeut la justice réparatrice, elle commence à voir le bout du tunnel, se reconstruit peu à peu. Met des mots sur ses douleurs, son parcours, ses mauvais choix. Elle nous raconte ici son histoire*.

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« Je ne souhaite à aucun enfant ce que j’ai vécu. Surtout si vous voyez quelqu’un à qui cela arrive ou si cela vous arrive, demandez de l’aide, ne vous taisez pas. Parce que le silence est complice de tout. » Ce sont ces mots que Sofia, jeune péruvienne de 15 ans, martèle avec force. Et courage. Avant de raconter son histoire. Sa petite enfance, elle la décrit comme belle. « J’avais tout ce dont j’avais besoin pour être heureuse : de l’amour, des amis, des jouets. »  Jusqu’au jour où son père, qu’elle ne connait pas, l’enlève à sa mère. L’emmène dans une autre ville. Elle n’a que 6 ans. « J’ai compris alors que mon père était une mauvaise personne et un voleur. Une découverte douloureuse pour une petite fille. Il buvait beaucoup et dès que je demandais des nouvelles de ma mère, il me battait. »

« Il criait sur ma mère, la frappait »

Un soir de l’année suivante, son père ne rentre pas. Il s’est fait arrêter par la police, lui dit-on. Sofia est placée dans un foyer pour enfants le temps que sa mère vienne la chercher. « J’étais affaiblie, très maigre, fatiguée… mais tellement heureuse de retrouver ma mère. » La joie est malheureusement de courte durée. Quelques temps plus tard, son père se réinstalle avec sa mère. Rapidement, le quotidien devient invivable. Son père rentre ivre, jette ou casse le peu qu’ils ont. « Il criait sur ma mère, la frappait, la faisait chanter en la menaçant de me kidnapper. Vous ne pouvez pas imaginer combien j’ai souffert de cette situation. Savoir que l’homme qui était mon père menaçait la vie de ma mère. »

« C’était une façon pour moi de faire face à ma peur »

À plusieurs reprises, elles se rendent avec sa mère au poste de police, mais rien ne se passe. Son père, lui, promet sans cesse qu’il va changer, qu’il ne leur fera plus de mal. À chaque fois, il recommence. Sofia a constamment peur, est perdue. À 11 ans, elle quitte l’école, sa mère. Rencontre des jeunes qui vivent dans la rue et s’installe avec eux. Elle commence alors à se droguer, à voler… « Je détestais être comme ça, mais je ne savais pas comment faire autrement. C’était une façon pour moi de faire face à ma peur. Ma mère a essayé de me sortir de la rue mais j’y retournais toujours. »

Écoutée, soutenue par notre partenaire OPA Niños libres

Sofia est arrêtée plusieurs fois et placée dans des centres de réhabilitation pour mineurs, dont une fois, un an et demi. « J’ai appris à vivre dans ces lieux difficiles. Quand j’y étais enfermée, je déprimais. Je souffrais beaucoup, mais je ne le montrais pas, parce que la vie y est dure. On y rencontre toutes sortes de gens, il faut être fort, il faut être violent pour survivre. »

Lors de son dernier séjour dans l’un de ces centres, Sofia rencontre l’association OPA Niños libres, partenaire du BICE dans le cadre du programme Enfance sans barreaux (EsB). Depuis, l’association l’accompagne dans une approche de résilience, l’écoute, l’aide à se réinsérer socialement. Sofia vit aujourd’hui chez sa mère. Elle dit ne plus avoir peur, vouloir arrêter la drogue, vouloir s’en sortir. Et insiste : « Je ne souhaite à aucun enfant ce que j’ai vécu. Et surtout si vous voyez quelqu’un à qui cela arrive ou si cela vous arrive, demandez de l’aide, ne vous taisez pas. »

*Ce témoignage est tiré du cahier du BICE, Justice réparatrice et résilience : voix, témoignages, propositions, qui sera publié prochainement.

À noter : Le BICE mène également plusieurs projets de lutte contre les violences à l’égard des enfants.

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