Une situation économique inquiétante
Dans la région de Sikasso, zone transfrontalière du sud-est du Mali, les conditions de vie se sont fortement dégradées depuis un an et demi. Sur le plan sécuritaire, déjà. La région qui connaissait un calme relatif jusqu’ici est devenue la cible de plusieurs attaques terroristes. Sur le plan économique aussi. La pandémie de covid-19 et les mesures prises pour l’enrayer ont ralenti l’activité économique ; ce qui a encore dégradé la situation de la population dont une grande partie tente de vivre de l’orpaillage*. Une activité qui s’est énormément développée ces dernières années mais qui, pour de nombreuses familles, est synonyme de pauvreté.
« Sur de nombreuses terres, l’orpaillage a remplacé l’agriculture. Les populations sont donc devenues dépendantes des villages voisins des pays frontaliers (le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire) pour manger. Dans ce contexte, la hausse des prix de certains produits comme l’huile, le mil ou le riz pendant la pandémie, du fait de la fermeture des frontières, a encore aggravé la situation. Cela a de surcroît encouragé les réseaux parallèles de passeurs ; une vraie source d’inquiétude pour les acteurs de la protection des enfants », explique le partenaire local du BICE.
Distribution de produits de première nécessité, de fournitures scolaires et de vêtements
Dans ce contexte, le BNCE-Mali, soutenu par le BICE, a proposé un soutien alimentaire et sanitaire à 100 familles particulièrement vulnérables d’enfants scolarisés à Bananso et Finkolo Dadjan. Riz, huile, oignons, lait, sucre, spaghettis ou encore maïs ont été distribués. Ainsi que du savon en poudre, du savon kabakourou ou encore de l’eau de javel en poudre.
Parmi ces enfants, 50 (19 filles et 31 garçons) ont également reçu des fournitures scolaires et des vêtements. « C’est un grand vide qui a été comblé, témoigne une maman. Mes enfants ont retrouvé la joie… Et nous avons de quoi manger. »
Distribution de kits sanitaires et de masques dans des écoles de Bananso et Finkolo Dadjan
Du savon, du gel hydro-alcoolique et des masques ont également été distribués dans quatre écoles de Bananso et Finkolo Dadjan. Des affiches expliquant les gestes barrières contre la covid-19 ont été accrochées dans sept écoles de la région. De plus 265 masques lavables ont été fournis aux élèves. « Les kits sanitaires donnés aux écoles leur permettent d’assurer au sein des établissements et pendant un long moment une certaine hygiène sanitaire. Toutefois, après discussions avec les autorités scolaires, nous nous sommes rendus compte que les besoins en masques étaient plus importants. Un point sur lequel nous devons travailler », explique notre partenaire.
Sensibilisation du plus grand nombre à la bientraitance
Depuis le début de la pandémie, le BNCE-Mali a aussi observé une détérioration des rapports intrafamiliaux. Sous pression, fragilisés par la covid-19 – mais aussi par la crise sécuritaire et politique dans le pays – certains parents ont multiplié les pratiques éducatives violentes. Dans ce contexte, il semblait donc fondamental de leur transmettre des stratégies d’éducation bienveillante ; de les aider à adopter ou à retrouver un comportement protecteur envers leurs enfants. Pour cela, le BICE et son partenaire ont organisé des journées d’information et de sensibilisation sur une parentalité plus responsable. Lors de ces rencontres mises en place dans 10 villages de la région de Sikasso, 400 personnes dont 172 hommes et 228 femmes ont pris part aux échanges.
Parallèlement, 25 acteurs de la protection de l’enfance et des leaders communautaires ont été formés à l’éducation positive. De plus, 15 rencontres avec 5 comités de quartiers et 10 associations de femmes à Sikasso ville ont été menées. Tous se sont engagés à diffuser les informations reçues et donc à promouvoir l’éducation bienveillante. Une avancée non négligeable dans cette région. En témoignent les histoires récurrentes sur l’utilisation courante de la violence au sein des foyers.
Témoignage d’une maman
Un exemple. Aby, à la fin d’une rencontre, a pris la parole pour faire part à la communauté de ses erreurs. « Des erreurs à ne plus commettre », témoigne-t-elle. Cette maman était très sévère avec ses enfants. À force de frapper et de crier contre l’une de ses filles, raconte-t-elle, celle-ci a été traumatisée. À la moindre chose, elle paniquait. À l’école, les enseignants se sont aussi rendus compte que l’enfant n’allait pas bien. Ils lui en ont parlé. Aujourd’hui, elle a cessé de crier ou de frapper ses enfants car elle a compris qu’elle était à la base du traumatisme de sa fille. « Ces moments de sensibilisation sur ce sujet sont importants. Nous devons tous nous rendre compte que les cris, les injures, les violences sont inutiles. Et que nous avons d’autres moyens, d’autres outils pour éduquer. »
Au regard de la situation, encore inquiétante, le BICE et le BNCE-Mali vont continuer à mener des actions dans cette région ces prochains mois.
*L’orpaillage, extraction artisanale de l’or, représente aussi une catastrophe environnementale pour la région ; les sols transformés en gruyère sont fortement pollués par les produits utilisés.