Projet multi-pays Enfance sans violences. Briser le cycle de la violence
Le BICE et ses partenaires locaux en Côte d’Ivoire, en Géorgie, au Pérou et en Ukraine ont relevé plusieurs causes à la violence et à la délinquance impliquant des enfants : politiques de prévention inadéquates, professionnels peu formés ou encore acceptation généralisée de la violence familiale. La pandémie de covid-19 a également aggravé le problème de la violence. Pour répondre à ces problématiques, le BICE a coconstruit avec ses partenaires un projet multi-pays sur trois ans, Enfance sans violences (jan. 2022-déc. 2024).
L’analyse effectuée dans les quatre pays du projet montre que le cycle de la violence et de la délinquance impliquant les enfants est déterminé par un ensemble de causes politico-institutionnelles et socio-économiques.
Tout d’abord, les politiques de prévention de la violence à l’égard des enfants sont souvent inadéquates ou partiellement appliquées. Les services de réhabilitation sociale ne répondent pas pleinement aux besoins des enfants. Et le nombre de spécialistes impliqués dans la protection des enfants est insuffisant. Autre enjeu de taille : l’adaptation des politiques publique de prévention aux nouvelles formes de menaces et de violences sur internet et les réseaux sociaux. Et l’absolue nécessité qu’elles s’adressent davantage aux enfants eux-mêmes, aux écoles et aux enseignants, aux parents.
Ensuite, les causes socio-économiques du cycle de la violence sont multiples. Notons l’acceptation généralisée de la violence intrafamiliale, en particulier à l’égard des filles ; le manque de connaissances parentales pour une éducation responsable et positive des enfants ; la toxicomanie répandue chez les adolescents ; ou encore les conditions économiques difficiles.
Quelques chiffres par pays
En Côte d’Ivoire, une enquête nationale réalisée en 2018 par le ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant a révélé que 58 % des filles et 66,5 % des garçons ont subi au moins une forme de violence pendant leur enfance. Et en 2019, selon l’Unicef, 30,1 % des répondants pensaient que les châtiments physiques sont nécessaires pour éduquer correctement un enfant.
En Géorgie, les attitudes de la société actuelle sont alarmantes, car près de la moitié de la population considère que la violence envers les enfants est acceptable. La majorité estime que les actes de violence domestique contre les enfants relèvent d’une affaire de famille. Elles’oppose ainsi à toute implication directe de l’État et des ONG. L’étude a également révélé que dans le cas où un citoyen décide d’intervenir, il ne sait souvent pas à quel organisme faire appel.
En Ukraine, selon la dernière étude de l’Unicef (2018), le phénomène de la violence envers les enfants reste largement sous-estimé dans le pays. Certaines formes de violence domestique à l’égard des enfants sont acceptées comme normes sociales. 42 % des parents pensent que la violence émotionnelle contre un enfant est acceptable à des fins éducatives.
Au Pérou, deuxième pays d’Amérique du sud en termes d’incidence des viols, le nombre de cas traités dans les centres d’urgence pour femmes est passé de 2 937 en 2007 à 6 593 en 2017 ; dont environ 69 % étaient des enfants et des adolescents.
Le projet multi-pays Enfance sans violences
Pour répondre à ces problématiques, le BICE et ses partenaires déploient le projet multi-pays « Enfance sans violences : synergies pour contribuer à rompre le cycle de violence et de délinquance impliquant les enfants et en réhabiliter les victimes » pendant 36 mois, de janvier 2022 à décembre 2024. Ils mènent des actions de formation et de sensibilisation des enfants, de leurs familles et des organismes impliqués dans leur protection. Ils proposent aussi des parcours de réhabilitation pour les enfants, victimes de violence ou en conflit avec la loi, avec un accompagnement adapté et résilient.
Au plan international, les partenaires ont l’opportunité d’effectuer des visites d’étude en France ; de renforcer leurs capacités dans le domaine du plaidoyer international pour les droits de l’enfant ; et de répliquer le festival de films documentaires Enfances dans le Monde du BICE.
Les pays d’interventions et partenaires
Il s’agit d’un projet interrégional sur 3 continents, dans 4 pays avec 4 partenaires :
Région | Pays | Partenaires | Lieu de mise en œuvre |
Afrique | Côte d’Ivoire | Dignité et Droits pour les Enfants en Côte d’Ivoire (DDE-CI) | District d’Abidjan, en particulier les communes de Abodo, Adjamé, Attecoubé et Yopougon ; ville de Dabou |
Amérique Latine | Pérou | Centro de Desarrollo y Asesoría Psicosocial (CEDAPP) | Lima métropolitaine, en particulier les municipalités de Huaycán et Monterrey A du district de Ate ; ville de Arequipa |
Europe | Géorgie | Public Health Foundation of Georgia (PHF) | Villes de Tbilissi, Batoumi et Zougdidi |
Ukraine | Women’s Consortium of Ukraine (WCU) | Régions de Kherson, Kiev, Odessa, Poltava, Rivne et Soumy |
Les bénéficiaires
Bénéficiaires directs :
- 540 enfants à risque d’être victimes de violence et/ou ayant des comportements à risque formés. Ils sauront ainsi reconnaître les différents types de violence ; et les possibilités de signalement et de protection, y compris dans un contexte pandémique et post covid-19
- 3 080 enfants victimes de violence, accompagnés pour leur réhabilitation
- 170 enfants en conflit avec la loi accompagnés pour une réinsertion durable
- 7 260 enfants améliorent leurs connaissances sur une pratique sûre du numérique et les droits de l’enfant
- 820 parents en difficulté accompagnés vers une parentalité bienveillante
- 4 500 parents améliorent leurs connaissances sur les formes de violence et le signalement
- 1 000 membres de l’entourage de l’enfant améliorent leurs connaissances sur la protection de l’enfance
- 30 leaders communautaires formés et accompagnés pour soutenir les familles confrontées à des difficultés éducatives
- 575 professionnels de protection de l’enfance formés. Pour un accompagnement adapté aux différents besoins des enfants en termes de prévention et de réponse
- 1 225 opérateurs de justice formés pour une meilleure compréhension et mise en œuvre du droit de l’enfant à être protégé
- 160 enseignants formés et suivis sur la prévention, l’identification, le signalement et le suivi des enfants victimes de violence
- 4 organisations de société civile (OSC) développent leurs politiques internes de protection de l’enfant
Bénéficiaires indirects :
- 74 800 enfants à risque d’être victimes de violence et/ou ayant des comportements à risque
- 19 860 enfants victimes de violence
- 3 600 parents en difficulté
- 19 425 membres de l’entourage de l’enfant
- 48 institutions publiques
- 28 organisations de la société civile
Le programme prévoit des objectifs précis, des résultats pratiques générés par des activités bien réfléchies.
Les objectifs du projet multi-pays Enfance sans violences
L’objectif global est de contribuer à briser le cycle de violence et de délinquance impliquant des enfants.
Deux objectifs spécifiques ont été établis :
- Objectif spécifique 1 : Les enfants à risque ou impliqués dans le cycle de violence ont acquis des compétences nécessaires pour prévenir les violences, y compris dans l’environnement marqué par la pandémie de covid-19.
- Objectif spécifique 2 : Les enfants impliqués dans le cycle de violence et de délinquance sont réhabilités grâce à un accompagnement pluridisciplinaire, qualitatif et personnalisé, y compris dans l’environnement marqué par la pandémie de covid-19.
Objectif 1 : les résultats attendus et les activités correspondantes
Trois résultats sont prévus dans le cadre de l’objectif spécifique 1.
Résultat 1. Les enfants à risque ou impliqués dans le cycle de violence ont accès à des programmes et des services leur permettant d’identifier, de prévenir et/ou de signaler les violences.
Pour atteindre ce résultat, le BICE et ses partenaires mettent donc en place les activités suivantes :
- En Géorgie, développement d’un programme de prévention constitué de 8 sessions pour les enfants âgés de 5 à 7 ans. Ce programme sera d’abord évalué dans trois écoles pilotes de Tbilissi.
- En Côte d’Ivoire, création et promotion d’un site Internet d’information pour les enfants sur les différentes formes de violence et les comportements à risque.
- En Côte d’Ivoire et en Ukraine, formation et soutien de groupes de jeunes leaders dans leurs activités de sensibilisation aux formes de violence à l’encontre des enfants.
- Organisation, dans les quatre pays, d’actions de sensibilisation aux droits de l’enfant et à la lutte contre les violences. Via la radio, Internet ou par le biais de mini festivals documentaires Enfances dans le monde.
- Renforcement des compétences de travailleurs sociaux en Géorgie.
Résultat 2. Les parents d’enfants à risque ont été sensibilisés à la parentalité responsable et les leaders communautaires ont appris les techniques de prévention et de médiation.
Pour atteindre ce résultat, le BICE et ses partenaires mettent donc en place les activités suivantes :
- Développement et diffusion de campagnes d’information (radio, web) sur la parentalité responsable et la prévention des violences, y compris sur Internet, en Géorgie, au Pérou et en Ukraine.
- Au Pérou, organisation d’ateliers pour renforcer les compétences de parents et autres personnes s’occupant des enfants et adolescents.
- Mise en place en Géorgie et au Pérou, d’un service de consultation auprès d’une équipe pluridisciplinaire afin de renforcer les compétences parentales.
- Au Pérou, gestion d’un centre de renforcement des liens entre les parents et les enfants : La Casita del Juego.
- En Côte d’Ivoire, formation de leaders communautaires et soutien de six initiatives dans les domaines de la prévention, de la médiation/réparation et de la lutte contre la violence faite aux enfants
Résultat 3. Les partenaires locaux ont acquis les connaissances et compétences nécessaires pour participer à l’élaboration et au suivi des politiques nationales contre la violence à l’égard des enfants.
Pour atteindre ce résultat, le BICE et ses partenaires mettent donc en place les activités suivantes :
- Supervision des engagements de la Côte d’Ivoire, de la Géorgie et du Pérou au titre du Partenariat mondial ; actions pour favoriser l’adhésion de l’Ukraine à ce Partenariat.
- Plaidoyer des partenaires locaux, soutenus par le BICE, devant le Conseil des droits de l’homme et le Comité des droits de l’enfant des Nations unies.
- Renforcement du réseau local et national des partenaires pour aboutir à une prévention plus efficace de la délinquance et des violences impliquant des enfants
Objectif 2 : les résultats attendus et les activités correspondantes
Deux résultats sont prévus dans le cadre de l’objectif spécifique 2.
Résultat 1. Les enfants victimes de violence et/ou en conflit avec la loi ont accès à un soutien psychologique, éducatif et juridique de qualité nécessaire pour développer leur résilience et faire face au traumatisme vécu.
Pour atteindre ce résultat, le BICE et ses partenaires mettent donc en place les activités suivantes :
- Renforcement des compétences et accompagnement des enseignants sur l’identification, le signalement et le suivi des enfants victimes de violence au Pérou.
- Formation des psychologues à l’accompagnement des enfants victimes des violences et aux bonnes pratiques d’expertise et d’audition au Pérou et en Ukraine.
- Formation d’opérateurs du pouvoir judiciaire (en particulier, juges et police nationale) sur la dynamique de la violence, y compris de nature sexuelle envers les enfants et les adolescents au Pérou.
- Formation d’éducateurs à la résilience, à la prise en charge des addictions chez les enfants en Côte d’Ivoire, ainsi qu’à la gestion d’activités génératrices de revenus.
- Dans les quatre pays, accompagnement psychologique, juridique et social des enfants victimes de violence, y compris de nature sexuelle et des enfants en conflit avec la loi.
Résultat 2 : Les professionnels de protection de l’enfance et les partenaires du projet mutualisent leurs expériences.
Pour atteindre ce résultat, le BICE et ses partenaires mettent donc en place les activités suivantes :
- Accompagnement, en Ukraine, de quatre organisations locales dans l’élaboration et la mise en œuvre de leurs politiques internes de protection de l’enfant.
- Étude et diffusion auprès des partenaires des bonnes pratiques de travail avec les enfants en conflit avec la loi en Géorgie et des pratiques d’audition des enfants victimes en France.
- Visites d’étude proposées aux partenaires des quatre pays, avec partage des bonnes pratiques de prévention et d’accompagnement mises en place en France.
Le projet multi-pays Enfance sans violences est mené avec le soutien de :
Découvrez ici le programme précédent de lutte contre la violence à l’encontre des enfants (2019-2021).