En vertu de l’adhésion du Saint-Siège à la Convention contre la torture et autres peines cruelles, inhumaines et dégradantes, ce dernier doit être régulièrement auditionné, tout comme les autres Etats parties ayant ratifié cette Convention, afin de faire un état des lieux sur cette question et de mesurer les progrès accomplis et les objectifs à atteindre. Cet examen vient de se terminer.
Pourquoi le contexte se prêtait-il à une possible tension entre le Comité contre la torture et le Saint-Siège ?
Tout d’abord, l’examen du Saint-Siège par cet organe de l’ONU intervenait seulement quatre mois après son examen par une autre institution de l’ONU, le Comité des droits de l’enfant. Or, ce dernier a suscité de vives tensions cet hiver, puisque les conclusions rendues ne prenaient pas en compte un certain nombre de paramètres soulignés par le Saint-Siège. (A ce sujet, lire notre article sur la rencontre du BICE avec le Pape).
Par ailleurs, le Saint-Siège et le Comité contre la torture avaient des divergences sur la zone géographique d’application de la Convention contre la torture et, de ce fait, sur les personnes qui seraient assujetties à ses dispositions. Pour les experts des Nations unies, le Saint-Siège est responsable des agissements de toute personne agissant officiellement en son nom dans le monde, pas seulement au sein de la Cité du Vatican, ce que conteste le Saint-Siège.
Enfin, certains experts demandaient que les positions anti-avortement de l’Eglise soient assimilables à des actes de torture envers les femmes.
Comment le BICE et d’autres ONG d’inspiration catholique ont-ils contribué à la discussion ?
Avant l’examen public du Saint Siège, le BICE, Caritas Internationalis, la Commission internationale catholique des migrations, le Service des jésuites pour les réfugiés et l’Association Pape Jean XXIII ont présenté un document (consultable ici) qui, à travers l’illustration de nos différentes missions auprès de groupes vulnérables, a permis d’équilibrer les points de vue. Nous y faisons notamment état d’un nombre considérable de pratiques fondées sur l’approche droit et mises en œuvre avec l’Eglise universelle, qui favorisent la bientraitance.
En quoi est-il important que le BICE soit cité dans les conclusions du Comité ?
Le Comité a fait en effet référence à l’audience que le Pape François nous a accordée le 11 avril 2014 et notamment à sa demande de pardon pour les abus sexuels commis dans l’Eglise, de même qu’à la nécessité de recourir à des sanctions. Pour le BICE, avoir été associé à ce moment historique et que cela soit souligné par l’ONU, est une reconnaissance du travail que nous réalisons depuis plus de 65 ans, aux côtés de l’Eglise, pour prévenir et protéger les enfants contre toute forme de maltraitance et instaurer une culture de la bientraitance.
En quoi les conclusions du Comité contre la torture sont-elles encourageantes ?
Le comité d’experts a respecté son rôle et son périmètre. Plusieurs éléments nous le prouvent :
- Il a auditionné le Saint-Siège de manière impartiale en engageant un dialogue constructif avec cet Etat partie.
- Il a reconnu des avancées dans la lutte contre la torture et l’abus sexuel, notamment à travers les modifications législatives substantielles adoptées récemment par le Saint Siège ainsi que par la mobilisation pérenne de l’Eglise pour promouvoir la dignité de toute personne humaine.
- Le ton de ses recommandations est respectueux tout en étant ferme : entre autres, nécessité d’une meilleure coopération des instances religieuses avec la justice locale lors de cas avérés ou suspectés d‘abus sexuel. Par ailleurs, il demande des chiffres plus détaillés et contextualisés sur ces crimes, ce qui nous semble tout-à-fait légitime.