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Action de prévention menée en Géorgie dans le cadre du projet Enfance sans violences
Action de prévention contre les violences menée dans les écoles. ©PHF
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Interview. « Le regard sur l’abus a évolué en Géorgie, on avance petit à petit »

Avec ses partenaires locaux*, le BICE mène depuis plus de deux ans, soutenu par l’Agence française de développement, le projet Enfance sans violences dans quatre pays dont la Géorgie. Rencontre avec Lia Saralidze, directrice de Public Health Foundation of Georgia (PHF). Elle décrit ici les actions menées, les avancées et les obstacles rencontrés.

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Pourriez-vous nous présenter le projet Enfance sans violences (EsV) sur lequel vous travaillez actuellement en Géorgie ?

Lia Saralidze : Notre projet actuel, qui se termine à la fin de cette année, est axé principalement sur la prévention de la maltraitance et de l’abus sur mineurs. Nous avons développé un programme éducatif destiné aux jeunes enfants, spécifiquement ceux en maternelle et en primaire. Nous y parlons des dangers domestiques, mais aussi des abus physiques, sexuels et de la façon de s’en prémunir. Nous avons dû relier cette question sensible à celle de la sécurité de l’enfant dans la vie quotidienne pour pouvoir intervenir dans les écoles. Sans cela, les parents s’y seraient opposés.

Lia Saralidze, directrice de Public Health Foundation of Georgia

Pourquoi les parents s’y opposaient-ils ?

La Géorgie, comme beaucoup d’autres sociétés, a longtemps eu des difficultés à aborder ouvertement les questions d’abus, notamment sexuels, en raison de profonds tabous culturels et sociaux. Ce sujet était souvent entouré de silence. Encore aujourd’hui, beaucoup de Géorgiens préfèrent croire que ces problèmes sont plus courants à l’étranger qu’à domicile. Je pense par exemple à une jeune fille de 15 ans, confiée à sa tante par sa mère partie travailler à l’étranger. Son oncle abusait d’elle. Quand la jeune fille en a parlé, personne ne l’a crue, y compris sa mère. Et elle a été rejetée par la communauté.

Et puis, il y a toujours une résistance à discuter de la sexualité de manière ouverte, quand il s’agit de sensibiliser les enfants. Quand PHF a commencé à se pencher sur ces sujets en 1999, il était courant que les parents interdisent à leurs enfants de participer à nos sessions éducatives, par peur ou par méconnaissance. Heureusement, grâce à des projets tels qu’EsV, les mentalités ont évolué. Aujourd’hui, le nombre de ceux qui reconnaissent l’importance de l’éducation et de la prévention pour la protection de leurs enfants a augmenté. Les jeunes parents notamment apprécient nos interventions.

Avec combien d’établissements travaillez-vous actuellement ?

Après une période de test au sein d’un établissement scolaire à Tbilissi, la capitale, nous avons mis en place notre programme dans quatre écoles à Zugdidi et à Tbilissi. Les réactions sont très positives, ce qui nous encourage à continuer. Nous envisageons ainsi d’étendre notre action à davantage d’écoles lors d’une nouvelle phase d’Enfance sans violences.

En quoi consiste précisément votre action en milieu scolaire ?

Nous traitons d’abord la thématique de la sécurité — en voiture, dans la rue ou que faire lorsqu’on s’est perdu. Et ensuite, nous abordons le sujet de la violence sexuelle : comment la reconnaître et la signaler. Tout cela, bien sûr, en utilisant des méthodes adaptées à l’âge des élèves. L’objectif est d’encourager les enfants à parler ouvertement à leurs parents ou à un adulte de confiance en cas de problème.

C’est le personnel éducatif, que nous avons formé au préalable, qui anime les 11 séances.

Comment les enfants réagissent-ils à ces ateliers ?

Les enfants sont très réceptifs. Ils apprécient ces sessions car nous les présentons sous forme de jeux éducatifs. Ils apprennent, par exemple, à traverser une route ou à réagir face à un comportement inapproprié. Nous les invitons également à exprimer librement leur refus de certaines marques d’affection, même au sein de la famille. Par exemple, Il est important de leur dire qu’ils ont le droit de refuser un bisou, s’ils n’en ont pas envie.

Au-delà de l’éducation, de la prévention, le projet Enfance sans violences comprend également des actions de prise en charge. Pourriez-vous nous en dire plus ?

Absolument. Nous soutenons les enfants victimes d’abus grâce à des techniques d’interview bienveillante. Nous disposons d’installations adaptées avec des systèmes d’enregistrement vidéo et des salles d’observation pour les professionnels, inspirés du modèle Barnahus en Scandinavie. Nous intervenons également lors des procédures judiciaires pour nous assurer que les droits de l’enfant soient respectés. Et puis, nous accompagnons les victimes sur le plan psychologique afin de les aider à surmonter le traumatisme et à se reconstruire.

Vous souhaitez impliquer davantage les médecins dans vos actions ?

Dans la continuité d’Enfance sans violences, nous voulons renforcer les compétences des médecins pour les aider à mieux reconnaître les signes d’abus sexuels, de maltraitance, et à savoir comment les traiter de manière appropriée. Nous avons déjà mené des formations similaires auprès de travailleurs sociaux et d’éducateurs. Et nous continuons à le faire car il est essentiel de renforcer les capacités de la société à aborder ces questions sensibles de manière professionnelle et éthique.

Comment envisagez-vous la suite du projet Enfance sans violences ?

Nous aimerions développer davantage les initiatives de sensibilisation auprès des enfants et des parents, ainsi que les formations de professionnels au contact d’enfants. Cela participe grandement à améliorer la protection et la prise en charge des enfants, et à faire évoluer les mentalités.

Nous aimerions également accroître notre collaboration avec les agences de l’État qui sont encore en train de se structurer afin d’améliorer la prise en charge juridique et psychologue des enfants victimes. Il est important de partager notre expérience et notre méthodologie avec le plus grand nombre.

Même si le chemin est long dans notre société, grevée par la pauvreté et l’extrême pauvreté, nous observons avec optimisme les petites avancées. Nous sommes ainsi convaincus que chaque petit pas est un progrès vers une protection plus efficace des enfants en Géorgie.

*Partenaires du BICE dans le cadre du projet EsV : DDE-CI en Côte d’Ivoire, PHF en Géorgie, Cedapp au Pérou et WCU en Ukraine.

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