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pandémie - aide alimentaire
Soupe communautaire distribuée au Paraguay
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Impacts de la pandémie sur les enfants : retours du terrain

Le BICE a transmis aux Nations unies, pour la 46e session du Conseil des droits de l’homme en cours du 22 février au 19 mars, une communication écrite regroupant des témoignages de ses partenaires sur l’impact de la Covid-19. L’objectif ? Continuer d’alerter sur les effets dévastateurs de la pandémie sur les enfants et émettre des recommandations.

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Augmentation de la violence à l’encontre des enfants, aggravation de la pauvreté, décrochage scolaire… Nos partenaires sur le terrain nous transmettent régulièrement des informations inquiétantes sur la situation dans leur pays. Nous partageons avec vous dans cet article, comme nous l’avons fait auprès du Conseil des droits de l’homme, quelques-uns de ces témoignages.

L’aggravation de la pauvreté à cause de la Covid-19

Selon la CEPALC (Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes), la part des personnes en situation de pauvreté pourrait passer de 30% en 2019 à 35% en 2020 en Amérique latine. En Argentine, face à l’accroissement de l’insécurité alimentaire, la paroisse de la Vierge Immaculée de Buenos Aires a augmenté la cadence de distribution de vivres depuis mars 2020. Quelque 1 900 rations hebdomadaires de denrées alimentaires sont distribuées dans les quartiers défavorisés de la capitale.

Au Chili, la Vicaría de Pastoral Social Caritas (VPSC) a livré depuis avril 2020 plus de 10 000 colis de nourriture aux familles les plus vulnérables. Selon le Fonds des Nations unies pour l’enfance, dans ce pays, l’incidence de la pauvreté dans les groupes d’enfants et d’adolescents est supérieure de 19 points à celle du groupe des personnes âgées de 35 et 44 ans, et de 31 points à celle du groupe des personnes de plus de 65 ans.

Au Guatemala, 1 ménage sur 4 est privé chaque jour d’un repas faute d’argent, selon notre partenaire ODHAG (Bureau des droits de l’homme de l’archevêché de Guatemala). À l’automne 2020, plus de 290 000 travailleurs de l’économie formelle avaient été suspendus ou licenciés de leur emploi. Environ 5 millions de Guatémaltèques vivant de l’économie informelle avaient réduit leurs revenus jusqu’à – 50%.

En République démocratique du Congo, une étude de l’Institut national de la statistique (INS) et de la Banque mondiale, réalisée en juin et juillet 2020, à Kinshasa a révélé que 87,8% des ménages s’inquiètent de ne pas avoir assez de nourriture et que 80,4% ont déclaré avoir réduit le nombre de repas par quotidiens.

La Covid-19 a accru le décrochage scolaire

Toujours en RDC, au Sud-Kivu, 67% des enseignants interrogés ont signalé une réduction de la fréquentation scolaire. Au Mali, où le conflit en cours avait déjà entrainé la fermeture de plus de 1 000 écoles laissant plus de 2 millions d’enfants sans éducation, la Covid-19 a encore aggravé la situation.  En raison de la grève des enseignants et surtout de la pandémie, la rentrée 2020-2021 a été repoussée à janvier 2021. Cependant, pour diverses raisons (manque de ressources des parents, travail des enfants, mariages forcés…), beaucoup d’enfants n’y sont pas retournés. Même constat de notre partenaire au Cambodge où les écoles sont restées fermées pendant de longs mois et la pauvreté s’est accrue.

Au Malawi, selon le rapport du ministère du Genre, pendant la fermeture des écoles, les grossesses précoces et mariages forcés chez les adolescentes ont significativement augmenté. Ainsi, dans le seul district de Mangochi à l’est du pays, il y a eu une augmentation exponentielle de grossesses précoces comparativement à la même période en 2019 où déjà 166 filles de 10 à 14 enfants avaient été victimes de grossesse précoce. La même tendance est observée à Phalombe où 1 000 adolescentes sont tombées enceintes. On en dénombre 400 à Mzimba, 324 à Nsanje, 64 à Blantyre, 58 à Nchinji et 20 à Kasungu. C’est autant de filles qui ne poursuivront certainement pas leurs études. La Haut-Commissaire aux droits de l’homme Michelle Bachelet a évoqué l’augmentation des grossesses des filles dans son allocution le 26 février au Conseil des droits de l’homme à Genève.

Nos partenaires arménien, géorgien, ukrainien, lituanien, kirghize et tadjike nous ont quant à eux fait part de la difficulté de mettre en place l’enseignement à distance. Ni les établissements scolaires, ni les enseignants et moins encore les parents n’étaient préparés aux cours en distanciel, qui impliquent l’accès à internet et la disponibilité des équipements techniques pour travailler en ligne. Les enfants issus des familles n’ayant pas les moyens nécessaires pour acquérir le matériel informatique ou financer l’abonnement internet n’ont pas pu suivre le programme d’études.

Interruption des soins et des activités culturelles, récréatives et artistiques

Les enfants en situation de handicap ont souffert de l’interruption des soins et de l’isolement. Notre partenaire Rhea en Géorgie nous a notamment fait part des effets négatifs sur les enfants de l’arrêt des activités d’intégration ; telles que les colonies de vacances, le sport, notamment le rugby, les spectacles de marionnettes, les loisirs dans les centres de micro-intégration…

Les enfants en situation de handicap qui vivent en institution ont, eux-aussi, pâti de la pandémie : visites des bénévoles interdites, isolement, risques de contagion et hospitalisation sans accompagnement. Cette situation a montré l’importance de la désinstitutionalisation.

Détérioration de la santé mentale de la population dont les enfants

En Colombie, la Covid-19 a entrainé l’aggravation des conditions de santé mentale de la population, avec une augmentation du suicide selon le ministère de la Santé. Au Pérou, selon une étude nationale, 70% des habitants se disent anxieux. Peur de perdre leur emploi, peur de tomber malade, peur de perdre un proche, peur de l’avenir…

En Arménie, suite  au conflit au Haut-Karabach qui avait éclaté de nouveau l’automne dernier, notre partenaire, Arevamanuk a souligné l’intensification du stress et du sentiment de peur chez les enfants qu’il accompagne.

L’augmentation de la violence à  des enfants dans le cercle familial

Dans tous les pays d’intervention du BICE, et plus largement bien sûr, le confinement, la fermeture des écoles, le chômage ou la perte de revenus, l’anxiété générale ont entraîné, dans de nombreuses familles, la détérioration des relations entre les parents et entre les parents et les enfants. Et, en effet, depuis le début de la pandémie, une augmentation des violences domestiques et de la violence à l’égard des enfants, y compris la violence psychologique, a été constatée.

Dans ce contexte, un travail important de soutien psychologique à distance a été mis en place pour pallier l’arrêt des séances en présentiel. Mais ces actions en ligne ne suffisent pas. En Russie, par exemple, le partenaire du BICE a constaté que deux tiers de familles qu’il accompagne ne disposent pas des équipements et moyens nécessaires (ordinateurs, tablettes, téléphones portables, abonnement Internet) pour bénéficier d’un soutien à distance.

Recommandations du BICE

  • Intégrer dans les plans de relance la protection des enfants contre la violence dans les cercles de confiance ; initier des programmes de longue durée dans les services de détection, d’orientation, d’accompagnement et de prise en chargedes enfants victimes de différentes formes de violence.
  • Instituer des programmes de soutien aux activités génératrices de revenus ; et des programmes de transfert d’argent aux familles œuvrant notamment dans le secteur informel et qui ont perdu leur travail.
  • Mettre en place des programmes de rattrapage scolaire pour les enfants, y compris des écoles non formelles, et les jeunes filles tombées enceintes, avec des facilités pour l’inscription et l’accès à la cantine scolaire.
  • Prendre en charge les enfants orphelins à cause de la Covid-19 afin qu’aucun enfant ne soit laissé de côté.

 

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