Dans ce pays d’Afrique australe, le constat est sans appel. Chez les adolescentes, les grossesses précoces, souvent associées aux mariages forcés, ont significativement augmenté pendant le confinement instauré au printemps 2020. Avec des conséquences dramatiques sur la vie de ces jeunes filles. Sur le plan de la santé d’abord, car ces grossesses sont souvent dangereuses pour la mère et pour l’enfant. Notamment en raison du manque de soins. Sur le plan scolaire aussi car la plupart des adolescentes ne retournent pas à l’école après avoir eu un enfant. Et puis, les filles tombées enceintes hors mariage sont souvent victimes de discriminations et de marginalisation.
Favoriser l’accès à la santé
Dans ce contexte, l’association locale African Network for Protection and Prevention Against Child Abuse and Neglect Malawi Chapter (ANPPCAN), qui travaille de longue date sur ce sujet*, a décidé fin 2020 de multiplier ses actions dans le sud du pays, avec le soutien du BICE**. Et ce, sur trois volets : la prise en charge médicale, le retour à l’école, la sensibilisation. En partenariat avec six écoles, l’ONG a ainsi identifié 266 jeunes filles tombées enceintes après la fermeture des classes en mars 2020. Puis a mis en place des « cliniques mobiles » pour informer ces adolescentes sur le plan médical et nutritionnel. « Nous sommes allés à leur rencontre avec des infirmières afin qu’elles aient une meilleure connaissance des besoins médicaux d’une femme enceinte et d’un bébé. Nous les avons ensuite mises en contact avec le système de santé formel. C’était important car elles en sont souvent très éloignées », explique notre partenaire.
Les aider à retrouver le chemin de l’école
En parallèle, pendant les six premiers mois de 2021, ANPPCAN a travaillé sur le retour à l’école de 275 enfants en décrochage scolaire. « Cette action a été ralentie par la deuxième fermeture des classes du 8 janvier au 12 mars. Mais nous avons quand même réussi à convaincre 186 filles – et leurs familles – de retourner en classe. 97 d’entre elles sont enceintes ou jeunes mamans », précise ANPPCAN. Le projet a également été élargis aux garçons, nombreux à avoir abandonné l’école suite au confinement. 89 ont ainsi reçu le soutien de notre partenaire. « Et pour faciliter la reprise scolaire de tous ces enfants, nous leur avons distribué des fournitures scolaires, des sacs et des masques. »
Sensibiliser le plus grand nombre aux droits des enfants
Troisième volet du projet, le travail de prévention en direction de divers publics. Quelque 350 parents ont ainsi été sensibilisés à la parentalité bienveillante avec un accent sur les dangers des grossesses précoces et des mariages précoces et forcés. 36 chefs traditionnels et éducateurs locaux de cinq districts, sensibilisés à la nécessité d’une action communautaire pour mettre fin à cette pratique, ont accepté d’aborder ce sujet avec leur communauté et de signaler les cas de mariages précoces et forcés aux autorités***. En parallèle, ANPPCAN a développé son partenariat avec la police.
L’ONG a également mené cinq campagnes de sensibilisation dans les écoles en direction des enfants et des parents. Distribué plus de 3 500 dépliants. Participé à quatre émissions de radio sur le sujet. Et enregistré plusieurs annonces sur les dangers du mariage précoce, diffusées pendant plusieurs semaines sur deux radios, radio Mzati et Times Radio. « Notre objectif est de sensibiliser le plus grand nombre de personnes, jeunes et adultes, afin que cette pratique, encore très répandue, cesse. À 14, 15 ou 16 ans, la place d’une jeune fille est à l’école, pas chez elle à s’occuper d’un enfant. »
* Selon Unicef, au Malawi, environ 46% des filles sont mariées avant l’âge de 18 ans, 9% avant 15 ans. C’est l’un des taux les importants au monde.
**dans le cadre du programme Initiatives covid.
***En 2015, une loi fixe à 18 ans l’âge minimum du mariage pour les filles et les garçons au Malawi. Puis, en 2017, un amendement constitutionnel interdit totalement les mariages précoces, en proscrivant toute dérogation.